Interview de Cédric Van Styvendael
28 avril 2019Cédric Van Styvendael,
responsable de la mission Accueillir à Villeurbanne
Pour quelles raisons avez-vous accepté cette mission ?
Dans mes fonctions, je suis confronté quotidiennement à ce sujet. Quand le maire me confie cette mission, j’espère faire passer l’idée d’une ville à capacité variable, qui peut absorber des arrivées avec beaucoup plus d’occupations temporaires. Il n’est pas possible de voir plus de 1 500 personnes à la rue tous les soirs alors que cette métropole possède des bâtiments inoccupés en capacité d’accueillir et des dents creuses(1) où l’on pourrait installer de l’habitat modulaire… Pas question de sanctuariser 3 000 places mais d’optimiser l’existant. Je vais donc fortement porter cette proposition du jury citoyen. Le travail de ce dernier montre que donner aux gens un sujet, des règles du jeu claires et un timing resserré produit des idées très concrètes. Ce sont des perspectives d’avenir sur une forme de démocratie citoyenne renouvelée. Enfin, ce qui m’a fait accepter la mission rejoint une conviction profonde : cette ville doit continuer à avoir une politique pour les plus modestes, ceux qui ont eu des parcours migratoires compliqués, sans rentrer dans un discours de peur et de repli dans un moment politique d’une grande violence, où on a du mal à se dire que nous pouvons vivre ensemble et nous faire confiance, sans naïveté.
Sur quoi insistez-vous dans ce rapport ?
Il y a déjà les 14 propositions opérationnelles du jury citoyen. Pour ma part, dans le rapport final, j’ai souhaité mettre l’accent sur 4 priorités. Renforcer les pratiques de “l’aller vers” pour s’assurer que chacune et chacun accèdent bien aux droits qui sont les leurs, l’équipe mobile d’accès aux droits proposée par le jury me semble une excellente idée à approfondir. A l’instar de la ville de Strasbourg, développer en pratique le concept de citoyenneté de résidence. La ville de Villeurbanne pourrait créer un Conseil villeurbannais pour la citoyennté des étrangers comme celui de Nantes et remettre une carte citoyenne lors de la cérémonie d’accueil des nouveaux arrivants. Le devoir d’interpellation du maire sur les législations européennes qui génèrent des situations aberrantes et la nécessité de faire connaître la vérité des chiffres. Sans nier les questions qui se posent, arrêtons de laisser dire : « On est envahis » quand ce n’est pas vrai. Ça ne convaincra jamais ceux qui n’ont pas envie d’accueillir mais, au moins, ça évitera les discussions de comptoir. Enfin, Villeurbanne est considérée comme pionnière dans la lutte contre les discriminations. J’ai envie que demain elle se positionne aussi comme pionnière en terme de politique hospitalière.
Justement, quelles suites espérez-vous à ce rapport ?
Que ce soit une politique publique de long terme. Sur ces questions-là, on ne peut pas être dans le seul registre émotionnel. Il faut s’inscrire, de manière pérenne, dans le droit commun de nos politiques classiques, et faire de l’accueil un sujet à part entière.
(1) En urbanisme, espace non construit entouré de parcelles bâties.