Une permanence pour les femmes victimes de violences

L’association villeurbannaise Viffil SOS femmes assure une permanence d’accueil, aux côtés d’autres associations de protection des femmes victimes de violences, dans le centre commercial de la Part-Dieu (niveau – 1) du lundi au vendredi de 14 h à 16h30 et des permanences téléphoniques du lundi au vendredi de 9h30 à 12h30 et 13h30 à 17h (sauf jeudi après-midi) – tél. : 04 78 85 76 47.
Une permanence pour les femmes victimes de violences

Vu de l’intérieur

Simon, éducateur spécialisé a écrit un texte pour témoigner de la réalité des femmes victimes de violences physiques ou psychologiques, particulièrement aiguë en ces temps de confinement synonyme pour certaines d’enfermement.

 

Encore un peu plus privée de lumière.
Encore un peu moins de liberté.
Encore un peu plus d’isolement mortifère.
Encore un peu moins d’air à respirer.
La femme victime de violences conjugales est confinée. Comme toutes les femmes. Comme
toutes les victimes. Pour une fois, comme tout le monde.
La femme victime de violences conjugales doit rester dans sa prison intime mais forcée.
Continuer à subir et continuer à se taire ; le temps reste suspendu, la spirale quotidienne se
répète. Un éternel jour interminable. Un éternel recommencement. Un jour sans réelle fin.
Encore un peu plus le temps pour lui. Encore un peu plus de survie pour elle.
Comment se protéger ? Comment se cacher ? Comment continuer ? Pour les enfants ? Pour
les voisins qui font semblants ? A qui crie-t-elle que ce n’est plus possible ? A qui confie-t-elle
qu’il faut partir ?
Peut-elle téléphoner ? A quelle heure ? Et si on l’appelle ? Peut-elle décrocher ?
Tous les jours de la semaine, malgré l’urgence sanitaire, l’association VIFFIL SOS FEMMES
continue d’être présente. Les permanences physiques ne sont plus. Les permanences
téléphoniques assurent le lien ténu « entre ce qui se vit chez soi » et « ce qui pourrait se vivre
ailleurs ». Car, chaque jour, de nombreuses victimes appellent les travailleurs/ses sociaux/ales
présentes. Tous les salarié.e.s restent mobilisé.e.s même chez eux.
Malgré une impuissance encore certaine, il faut écouter et tenter de rassurer. Malgré les
nombreuses incompréhensions que le téléphone amène, il faut expliquer comment faire pour
se protéger. Au moins tenter. Au mieux écouter. Au pire raccrocher car les tensions sont vives
et le bourreau guette. Pour de nombreuses victimes de violences conjugales, violences
domestiques-régulières-quotidiennes - violences qui surviennent le plus souvent d’une
dispute pour un repas, un ménage, un « c’est comme ça qu’il faut faire », « tu sers à rien »,
« le frigo est vide », « pourquoi il pleure tout le temps, occupe-le » « pourquoi ta famille nous
appelle », « c’est de ta faute si je suis énervé » - la seule respiration dans une journée sur lequi-
vive est le moment où IL part, où IL quitte la maison pour travailler ou vaquer à d’autres
loisirs. Cette respiration s’est coupée et les émotions qui ne s’oxygènent plus deviennent
pesantes et nuageuses.
A distance, quand le téléphone sonne à VIFFIL et qu’une victime a 5 minutes pour parler, il
faut s’adapter. Quand il faut la rappeler en numéro masqué et qu’elle décroche enfermée
dans les WC, il faut se confronter à la réalité. C’est dur et insaisissable. Indicible et blessant.
Vendredi, une femme appelle. Monsieur est en garde à vue mais ne sera pas jugé malgré les
15 jours d’ITT. La justice ne peut pas faire face. Malgré l’interdiction de l’approcher, madame
craint qu’il brise sa porte d’entrée. Madame est chez elle avec ses deux enfants. Madame a
toujours fui et ne veut plus le faire malgré la demande de mise en sécurité.
Raccrocher avec l’inquiétude et la peur d’un féminicide de plus.
Et puis, continuer à écouter, continuer à faire équipe pour accompagner « confiné.e.s ».


Texte écrit par Simon, éducateur spécialisé à VIFFIL SOS femmes

 

 

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