Victimes de la fracture numérique, ils interpellent la Défenseure des droits

Des habitants de la résidence pour personnes âgées Gustave-Prost, à Villeurbanne, tirent la sonnette d'alarme : avec la dématérialisation galopante, c'est toute une génération qui court à l'isolement.
Trois des résidentes de Gustave-Prost à l'initiative de la pétition.

La dématérialisation des échanges et des procédures est-elle forcément un progrès ? Non, répondent les habitants de la résidence autonomie Gustave-Prost. Publiques comme privées, de plus en plus d'institutions obligent les usagers aux démarches en ligne – quitte à créer des situations ubuesques. « Impossible de prendre rendez-vous par téléphone chez mon dentiste, j'ai donc été obligée de changer : maintenant je vais à la clinique dentaire », raconte par exemple Henriette Bojuc, 87 ans. Billets SNCF, compte Ameli, informations, mutuelle, déclaration d'impôts... Autant de services qui peuvent sembler banals aux plus agiles, mais qui exigent une aisance en ligne que tout le monde n'acquiert pas – notamment les personnes âgées.

A l'été, des résidents se constituent en collectif dans le but d'interpeller la Défenseure des droits, Claire Hédon. Ils récoltent plus de 70 signatures et l'initiative essaime même jusqu'à la Fondation de la Cité Rambaud, une résidence autonomie voisine. Dans sa réponse, le délégué de la Défenseure des droits écrit : « L'usager doit pouvoir choisir le mode de communication le plus approprié à sa situation lorsqu'il échange avec l'administration. » En théorie, peut-être... Dans les faits ? Cela reste à voir. Sollicitée, la Ville soutient la démarche et débloque « plus de deux millions d'euros » sur une nouvelle mission d'inclusion numérique.

« Un diktat qui se prépare »

Le collectif réclame une « présence humaine pérenne » dédiée à ces questions. « Il n'est pas question de faire le procès de la révolution numérique, rajoute Françoise Jauregui, 83 ans, mais cela nécessite une pratique quotidienne qui nous laisse à la traîne. C'est un diktat qui se prépare ! » Tout aussi inquiète, Nicolle Tribondeau-Naton, 87 ans, rappelle l'essentiel : « Ce n''est pas le numérique que nous craignons, mais l'isolement. Nous réclamons simplement plus d'humain ! » En 2019, l'Insee a évalué à 17 % la part de la population en proie à l'illectronisme.

 

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