Témoignage de Bernard Gaud
3 novembre 2015« C’est en voisin et jeune musicien fasciné par les Beatles que j’ai d’abord découvert l’orphelinat. C’était en 1963, j’étais à peine majeur… L’orphelinat avait déjà soixante ans d’existence et les habitations avaient progressivement fait leur apparition, remplaçant les champs et les moutons du début du siècle ! Un jour, j’ai joué de la musique pour eux et ça a été un choc émotionnel de les voir, tous, uniquement des garçons, en blouse grise, écoutant dans une certaine discipline. Ce choc n’est d’ailleurs peut-être pas étranger au choix de ma profession. Je me destinais à l’enseignement du sport, mais je suis devenu éducateur pour venir en aide aux enfants en difficulté. J’ai exercé mon métier dans le sud de la France, puis de nombreuses années dans le Beaujolais, mais je suis toujours resté en contact avec des éducateurs de l’orphelinat. 5 000 enfants y ont vécu ou fait un passage, plus ou moins long et plus ou moins religieux, selon les époques. De 1901, date de création, aux années 1950, l’orphelinat était très marqué par la vie religieuse prônée par les missionnaires de la Salette. Les journées étaient rythmées par des prières, des déjeuners en silence, des messes, etc. Il a fallu attendre les années 1960 pour qu’une vie plus libre s’y développe. Documents internes, témoignages d’anciens, bulletins d’informations de l’orphelinat et appels réguliers aux dons témoignent de la vie de cet établissement qui a longtemps ressemblé à l’antichambre du petit séminaire. Au fil de mes recherches, j’ai constaté que le froid et la faim faisaient partie du quotidien des garçons. Mais pour eux, il y avait aussi le grand air, tout l’été, avec l’acquisition d’une colonie à Frontonas, dès 1928. Cette escapade devait vraiment être bienvenue ! Nous avons la chance de disposer de nombreuses sources qui nous permettent d’avoir une idée de ce que recouvrait le terme éducation entre 1901 et 1974… C’est une belle traversée ! »